Texte d’Hervé Géréec

« Pluies et Vagues » –  Marion Zylberman, le risque de la simplicité

Qu’est-ce qui pousse inlassablement Marion Zylberman à dessiner et peindre les pluies et les vagues ?
Pas de figures, de personnages, à peine des paysages. Seulement l’eau, toujours identique et pourtant multiple, sous toutes ses formes célestes – brouillard, brume, bruine, crachin, averse, giboulée, orage, déluge – et terrestres – embrun, vaguelette, houle, lame, rouleau, déferlante, ressac et écume.

Marion Zylberman est avant tout une grande voyageuse. Née en 1957, elle fait ses études à l’école des Beaux-arts de Bourges. Après quelques années passées en Haute-Provence et dans les Cotes d’Armor, entrecoupées de séjours en Thailande, à Taiwan, en Inde et en Egypte, elle embarque en famille en 1993 à bord du Petit-Foc, du Leenan-Head puis du Velleda pour une aventure maritime de 8 ans. Ce périple ponctué d’escales bretonnes et d’un voyage au Mexique la mène sur les iles atlantiques, en Irlande, en Ecosse, en Norvège, en Suède et aux Pays-Bas, puis en Galice, à Madère, à Santa-Cruz de Palma et aux Aores, et enfin en Méditerranée. Après une escale prolongée de 5 ans en Corse, elle revient en Bretagne en 2006 poser ses valises à Penmarc’h. C’est lors de cette longue croisière qu’elle prend l’habitude des carnets.  » Le principe était d’avoir mon atelier dans un sac à dos. J’avais toujours trois carnets sur moi, l’un pour la couleur, l’autre pour le noir et blanc et le dernier pour les notes. »
La navigation est aussi une rencontre avec les éléments, mais elle dessine peu les pluies et les vagues, davantage les paysages. Ces thèmes s’imposent plus tard, en Corse et à Penmarc’h.

Crayon, encre, peinture, sur petits ou grands formats, tous les moyens sont bons pour saisir l’élément liquide. Elle en remplit des carnets, en recouvre des toiles. Sous son pinceau, les pluies deviennent flux et les vagues deviennent écume. à reproduire perpétuellement le même motif jusqu’à le rendre abstrait, Marion Zylberman semble à la recherche de quelque chose. Peut-être de la part d’universel qui réside en toute chose. Cette gymnastique peut sembler austère, mais il s’agit plus de simplicité, une simplicité qui tient de l’ascèse. C’est cette obsession de la simplicité et la vive énergie présente dans ces oeuvres graphiques et picturales qui fascinent chez Marion Zylberman, car la simplicité est une prise de risque en art.  » Le meilleur moyen de savoir ce qu’on veut dire, c’est de vouloir dire la même chose tous les jours, avec patience, et de se familiariser ainsi avec la formule employée, dans tous ses sables mouvants. » (Samuel Beckett, Peintres de l’empêchement).

Hervé Géréec