À propos des tableaux-nuit de Marion Zylberman

Texte de Michèle Bompard-Porte

…………… Juste avant
L’indigo est si intense qu’elle finit par concevoir un ciel rouge
Elle n’a jamais dépensé autant de noir, sauf pour peindre l’écume des vagues
Ses goélands portent l’air et les nuées parmi la puissance
pierreuse de leurs vols
Les pluies qu’elle crée escaladent le zénith, comme les murailles
de ses mers dressent vers les cieux d’improbables esquifs
funambules
……………
Maintenant
Marion Zylberman illumine le monde alentour de ses nuits

Par une nuit obscure,
enflammée d’un amour plein d’ardeur,
ô l’heureuse aventure
j’allai sans être vue
sortant de ma maison apaisée.

(Jean de la croix)……………

Les contraires se rencontrent, se renforcent et se fragilisent en sa peinture.
La nuit n’est-elle pas plus nuit, et la lumière, plus lumière, dans leur
commune déflagration ? (les mots trahissent la vigueur de l’oxymore en
acte coloré)
Discerner les contraires et leurs conflits en ses visions somptueusement
vivantes nous transforme soudain. Nous voici lieu de leur recueillement –
« heureuse aventure »
La singulière force de ses gestes nous est donnée de surcroît
Nous voici source des formes et de l’énergie. Amour divin, selon Jean de
la croix. Accès aux espaces des possibles – version laïque. Espaces stables et
instables, dans le suspens ambigu des oppositions dont ils se soutiennent
(« […] la lutte engendre toutes choses. » ; « L’harmonie du monde est par
tensions opposées, comme pour la lyre et pour l’arc. » Héraclite, extraits
des fragments 8, puis 51)
Joie de jouer. Même si c’est tragique – rochers d’Ouessant, Mémorial
pour cadavres et épaves – honorer la Vie, fût-elle agonique

Générosité de Marion Zylberman

 

Michèle Bompard-Porte…………..
08 décembre 2013. Saint Guénolé. Penmarc’h…………..